Choisir une densité de plantation pour les agrumes

La question de la densité de plantation n'était jamais posée par les intéressés, qui semblent vouloir reconduire tout simplement les densités des plantations existantes.

Choisir une densité de plantation pour les agrumes
 Choisir une densité de plantation pour les agrumes

Quelle densité de plantation choisir pour nos agrumes ?

La logique voudrait qu'on se pose la question de savoir si les densités pratiquées jusqu'à maintenant ont donné satisfaction ou pas ; le problème des densités ne doit pas se poser uniquement en terme de rendement brut, mais il faut viser également un calibre commercial et autant que possible des qualités internes.

La meilleure densité sera celle qui permettra aux arbres d'atteindre un développement qui réunira rendement, calibre et qualité.

Choix de l'écartement définitif des plantations

On peut considérer l'arbre comme une usine transformant l'énergie solaire en tissus végétaux. Le poids total de matière sèche formé à l'Ha est donc limité par la quantité de lumière reçue.

On peut dire que la quantité de matière sèche formée est la même pour toutes les densités à condition que toute lumière reçue soit interceptée par les feuilles.

Mais ce n'est pas de la matière sèche brute qui nous intéresse dans le cas des Agrumes. Nous cherchons un tonnage, maximum de fruits, d'un certain calibre et ayant un minimum de qualités internes.

La surface vitale nécessaire pour un arbre

Le premier problème est de définir quelle dimension il faut laisser à l'arbre pour qu'il donne le maximum de rendement dans la qualité voulue. En fonction de cette dimension on définira la densité de plantation c'est à dire, à quelle distance doivent se trouver ses voisins pour qu'il reçoive suffisamment de lumière.

Nous avons d'abord parlé de l'influence de la lumières cette notion n'est pas toujours comprise par les Praticiens.

Le besoin des feuilles en lumière

La feuille a besoin de la lumière pour procéder aux synthèses chlorophylliennes mais elle n'a pas besoin de la totalité de la lumière solaire. On estime qu'elle peut donner son rendement maximum même avec 30 % de lumière solaire.

La pousse des nouveaux rameaux est sous la dépendance de la lumière ; on n'observe pas de départ de débourrement sur les arbres touffus.

Le besoin des fleurs en lumière

Les fleurs ont besoin d'un minimum de lumière pour nouer. Il est d'observation courante que la nouaison est très faible à l'intérieur des arbres touffus et notamment du côté Nord de l'arbre dans les régions situées au Nord d'EL JADIDA.

Action de la lumière sur les fruits

L'action de la lumière sur les fruits est indirecte en ce sens que le fruit est nourri par les feuilles voisines. Si ces feuilles reçoivent le minimum de lumière requis, le fruit obtiendra son calibre et sa teneur en sucre maximum en fonction du courant de sève sur lequel il est placé.

La lumière a une action favorable sur l'intensité et la précocité de la coloration des fruits. Suivant certains auteurs, le % du jus est faible sur les arbres ensoleillés. L'alternance est augmentée quand les arbres se gênent.

L'absence de la lumière

La lumière n'affecte pas la forme du fruit ni l'épaisseur de la peau. L'absence de la lumière peut conduire à un retard de maturité de plus de 5 jours.

On dit généralement que l'absence de lumière augmente l'acidité mais ce n'est pas toujours vérifié.

Les considérations qui précédent, expliquent l'importance que nous accordons aux différentes opérations de taille des agrumes, qui visent à capter le maximum d'énergie solaire et la répartir uniformément à l'intérieur.

Si on n'a pas assez de lumière, les arbres tendent à prendre une forme de colonne plutôt qu'une sphère. Le taux de nouaison sera faible.

L'effet de la lumière sur le calibre des fruits

D'après les chercheurs Américains, la lumière n'a pas d'influence sur le calibre tant que les arbres ne se gênent pas entre eux. A partir du moment où ils se gênent, la lumière augmente le calibre.

On peut donc se demander dans le cas de la Navel quelle densité de plantation devons nous choisir ? Si pour avoir du calibre moyen, il faut planter serré ou écarté. Si on plante serré on aura un taux de nouaison plus faible et on sera obligé de tailler fort. L'expérience a montré que dans ces conditions on obtiendra un gros calibre.

On se trouve donc dans une impasse. Nous pensons que si nous arrivons à former de grand arbres bien éclairés pouvant porter un grand nombre de fruits, nous arrivons au calibre souhaité.

La course à la lumière 

Le risque des fortes densités est que les arbres entrent en compétition pour la réception de la lumière. La concurrence pour les éléments fertilisants ne joue pas à notre avis, car en principe on peut toujours les apporter en quantité suffisante.

Il en est de même pour l'eau car l’E.T. P est surtout réglée par la demande climatique qui ne dépend pas de la végétation.

A partir du moment où le terrain est à peu près couvert l’E.T. P est sensiblement la même quelle que soit la densité de plantation.

La densité dépend de la variété et du porte greffe 

Le but recherché est donc de planter le maximum d'arbres par Ha sans qu'ils se gênent entre eux. Pour trouver la densité, il nous faut donc connaitre quel développement nous entendons donner à l'arbre.

Si on abandonne l'arbre à lui-même, il atteindra un développement maximum qui dépend :
  • De la variété
  • Du porte-greffe
  • Du climat
  • De la texture du sol
  • De l'épaisseur du sol.

A son développement maximum l'arbre bien taillé donnera un grand nombre de fruit, qui pourront d'ailleurs se concurrencer entre eux. En outre, plus l'arbre vieillira, plus le calibre aura tendance à devenir faible.

Les variétés se classent par vigueur décroissante dans l'ordre suivant :

  • Citron
  • Pomélo
  • Maroc Late (Valencia)
  • Navel
  • Clémentine.

La densité de plantation dépend du sol

En Corse, sur terrain acide le Citrange Troyer pousse mieux que le Bigaradier mais on observe en Espagne que les arbres sur Citrange Troyer poussent moins bien que ceux sur Bigaradier et les autres porte greffes.

Le climat du Souss est beaucoup plus favorable à la pousse des Citrus que la région relativement froide de Larache. Plus on va vers le Sud plus les agrumes trouvent un climat qui leur convient.

Les agrumes poussent beaucoup mieux dans les sols sableux que dans les terrains lourds.

Dans les sols de peu d'épaisseur, les arbres ne peuvent pas atteindre un grand développement.

La conduite des arbres

Le volume d'un arbre peut aussi être limité par la taille. Des tailles fortes augmentent provisoirement la vigueur végétative diminuent le nombre de fleurs et de fruits qui atteignent alors un calibre meilleur.

Mais il faut être prudent car des tailles très fortes affaiblissent l'arbre et peuvent réduire à l'excès ses dimensions. Inversement des tailles légères mais suffisantes pour laisser entrer la lumière, conduisent à un grand nombre de fruits, qui vont se concurrencer entre eux.

Il résulte de ce qui précède que la taille sera différente suivant le calibre désiré. On taillera un peu fort les variétés dont on cherche à augmenter le calibre et plutôt faiblement celles dont on diminue le calibre.

Il s'en suit que les arbres à petit calibre seront maintenus petits puisqu'on leur appliquera une forte taille. Inversement les arbres à gros calibre atteindront de grandes dimensions puisqu'on les taillera faiblement.

Choix de l'écartement à la plantation

Au Maroc la plupart du temps, on a planté avec l'écartement définitif. En cela on a suivi d'ailleurs l'exemple Américain et de l’Espagne.

Cependant des tentatives de plantation à forte densité au départ ont été faites dans les régions d'Agadir.

Au Maroc et en Espagne, la tendance actuelle est de planter systématiquement à double densité au départ. On note une tendance analogue en Australie, en Afrique du Sud, au Brésil et partout dans le monde.

L'ancienneté des premières plantations serrées permet d'avoir une opinion bien établie sur leur intérêt.

Le dédoublement des fortes densités

Toute les expériences ont montré que jusqu'à la 9ème, 10ème, et 11ème année les rendements étaient presque doublés dans les plantations serrées au départ sans qu'on observe une perte sur le calibre, la qualité ou la précocité des fruits.

Mais tout le monde est également d'accord pour constater que, dès que les arbres se touchent et se gênent, on observe tous les inconvénients de manque de lumière que nous avons décrits précédemment.

La question qui se pose est double :

1- Le revenu accru des 10 premières années compense-t-il les frais supplémentaires de la forte densité ?

2- Que doit-on faire au moment où les arbres commencent à se gêner ?

A la première question, nous allons apporter plusieurs réponses. une études faite en Australie a montré que sur la Valencia le moment où les recettes équilibrent les dépenses, se produit, la 8ème année pour la densité de plantation normale et la 7ème année pour les densités doubles.

Dans une autre expérience en Australie, ils ont trouvé que les frais entrainés par la densité de plantation double sont récupérés dès la deuxième récolte.

Sans aller si loin nous avons observé à Sous et au Gharb ces dernières année (2016 - 2017 - 2018 - 2019) des rendements qui dépassent 50 T/Ha sur des plantations de 8 ans avec un écartement de 6x2.

La réponse à la deuxième question est plus difficile. on peut d'abord se demander s'il est vraiment nécessaire d'arracher un arbre sur deux quand ils commencent à gêner.

La taille pourra-t-elle éviter le dédoublement ?

Des expériences ont montré que par la taille, on pourrait limiter les dimensions d'un arbre au niveau voulu. Si on taille un arbre trop fort on va l'affaiblir. Il aura à ce moment moins de pousses, les besoins de taille vont diminuer et on arrivera à ce moment à un équilibre.

Cette méthode n'a pas été essayée systématiquement au Maroc sur une durée suffisamment longue pour qu'on puisse tirer une conclusion. Il est possible qu'elle réussisse mais dans l'état actuel de nos connaissances nous ne pouvons pas le promettre.

D'après la littérature étrangère, la grande erreur consiste à se décider trop tard. Si l'arrachage est effectué au moment où les arbres commencent seulement à se gêner, la chute de production sera faible et dès la 2ème année, la plantation aura retrouvé son rendement.

Par contre il a été constaté que si l'arrachage s'effectue au moment où les arbres se gênent beaucoup, la chute de la production après cette opération devient sévère et à ce moment les rendements peuvent ne se rétablir qu'au bout de 3 à 4 ans après.

Les solutions intermédiaires

Il existe une solution intermédiaire applicable seulement là où les frais de main-d’œuvre sont moins élevés que dans les pays industrialisés.

Pour cela on raccourcit les branches de l'arbre condamné de façon à ce que les arbres restant puissent prendre la place progressivement.

L'arrachage n'est opéré qu'au bout de 3 ans. Avec cette méthode on peut conserver le rendement.

Toutefois, étant donné que cette réduction de dimension est assimilable à une taille sévère, on doit s'attendre à une augmentation du calibre. Ceci est un inconvénient pour la Navel, qui de ce fait ne pourra pas bénéficier de cette méthode.

Une 3ème solution qui est actuellement aux essais, consisterait à appliquer des ralentisseurs de croissance. Il est trop tôt pour engager les producteurs dans cette voie.

Conclusion

Nos connaissances sont suffisamment avancées pour qu'on puisse proposer des densités de plantation en fonction des régions, en tenant compte de la vigueur des arbres, du climat, de la texture du sol et de son épaisseur et éventuellement des eaux salées.

Nous estimons qu'il est rentable de planter à double densité au départ sauf pour la W.Sanguine mais à condition que la décision de supprimer les arbres en excès soit prise dès que les arbres commencent à se gêner. Sauf dans le cas de la Navel, l'arrachage brutal pourra être précédé d'une période de 3 ans pendant laquelle les arbres destinés à l'arrachage pourront être progressivement réduits.



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